Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Qui veut gravir la montagne commence par le bas
31 août 2007

Marché

Hier Cathy et Flo m’ont emmenée faire mes courses de bouffe au marché, c’était génial. Je ne peux pas vous décrire un marché d’un pays en développement, j’ai essayé avec Arthur, c’est impossible. Il faut juste savoir, que sur un marché comme celui là, vous pouvez tout trouver. Quand j’aurais mes habitudes et mes mamacitas attitrées, je pourrais peut être tenter de leur soutirer le droit de faire une photo de leur tiendita (petite boutique, mais c’est pas une traduction qui me satisfait beaucoup puisque les petites boutiques en France n’ont absolument rien à voir avec celles là.) En essayant de vous décrire mon quotidien ici, je me rends compte à quel point, ce qui est pour moi une autre réalité mais toute aussi normale que celle de la France, est en fait pour vous, en tous cas pour ceux qui n’ont jamais mis le pieds en Afrique en Asie ou en Amérique du Sud, quelque chose d’inenvisageable et d’indescriptible. A 5 ans je traduisais ma mère en taï quand elle allait faire son marché en Thaïlande. J’avoue que j’ai beaucoup de mal à imaginer mes réactions sans mon passé, et donc les vôtres si vous visualisiez en direct ma vie ici. 

Ici, tout se trouve dans la rue, des lignes de téléphone internationales, aux cigarettes, en passant par les jus de fruit, pressés sous vos yeux. Le marché est un lieu hyper local qui peut même parfois être un monde où il est difficile de rentrer. Certaines mamitas refusent de nous servir parce qu’elles ne servent pas les blancs, et basta, terminé, rien à faire, passe ton chemin ma grande. Elles nous méprisent et ont avec nous le même comportement qu’une reine avec ses sujets. Mais le marché est aussi un lieu où l’on construit ses réseaux, où les prix baissent à partir de la troisième visite dans la même tienda, où nos mamitas attitrées nous gardent sous le coude leur meilleurs morceaux de poisson. C’est un lieu où il ne faut pas aller la nuit, mais où le jour tout est permis, même d’être blanc. C’est un lieu où il ne faut jamais avoir l’air perdu et connaître les heures les meilleures pour avoir un bon morceau de viande bien frais. C’est aussi un lieu où l’on apprend qu’un bolo est un bolo, et que même si pour nous ça n’est rien (1 centime d’euro), ici c’est déjà quelque chose. Faire son marché et prendre un kilo de farine à 5 bolos plutôt qu’à 7, prix qu’on te donne la première fois à ta tête, c’est encore et surtout affirmer haut et fort que les blancs ne sont pas des dollar sur pattes, que nous aussi, malgré notre couleur on peut être intégré au système, et que oui, on est au courant, c’est comme ça que ça marche. Engueuler un taxi parce qu’il te fait payer ta course 5 bolos au lieu de 3, parce que tu viens de lui dire que ça fait dix jours que tu es arrivée, c’est un devoir. Je ne sais pas comment vous expliquer ce sujet très difficile que j’ai longtemps enfoui bien profondément parce qu’il me dérangeait. Mais revenue dans un pays comme ici, maintenant je sais. Ne pas céder aux prix doublés à la gueule, marchander, protester et s’en aller si l’autre en face ne cède pas, c’est leur faire admettre qu’on est aussi des humains, et que les rapports humains ce n’est pas d’abord, tu as plus de fric donc tu m’en donnes plus. C’est aussi ne pas rentrer dans le jeu du chantage à la misère qui marche tellement bien avec les touristes européens. C’est enfin considérer les gens d’ici comme des gens, et pas comme des pauvres. C’est instaurer un rapport humain et non pécunier.

Publicité
Commentaires
Qui veut gravir la montagne commence par le bas
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité